vendredi 27 janvier 2012

Vian

Je ne voudrais pas crever avant d'avoir connu les chiens du Mexique qui dorment sans rêver,
Les singes à cul nu dévoreurs de tropique,
Les araignées d'argent aux nids truffés de bulles.
Je ne voudrais pas crever sans savoir si la lune sous son faux air de thune a un côté pentu,
Si le soleil est froid,
Si les saisons ne sont vraiment que quatre,
Sans avoir porté une robe sur les grands boulevards,
Sans avoir regardé dans un regard d'égout,
Sans avoir mis mon zob dans des coinstots bizarres.
Je ne voudrais pas finir sans connaître la lèpre ou les sept maladies qu'on attrape là-bas.
Le bon ni le mauvais ne me ferait de peine si je savais que j'en aurais l'étreine.
Et il y'a aussi tout ce que je connais, tout ce que j'apprécie, tout ce qui me plait.
Le fond vert de la mer où valse des brins d'algue sur le sable ondulé, l'herbe grillée de Juin, la terre qui craquelle, l'odeur des conifères.
Et les baisers de celle que ceci, que cela, la belle que voilà, mon ourson, l'Ursula,
Je ne voudrais pas crever avant d'avoir usé sa bouche avec ma bouche, son corps avec mes mains, le reste avec mes yeux.
Je n'en dis pas plus il faut bien rester réverencieux.
Je ne voudrais pas mourir sans qu'on ait inventé les roses éternelles, les journée de deux heures, la mer à la montagne, lamontagne à la mer, la fin de la douleur.
Les journaux en couleur.
Tous les enfants contents.
Et tant de truc qui dorment encore dans les crânes géniaux ingénieurs, des jardiniers joviaux, des sociaux socialistes, des urbains urbanistes et des pensifs penseurs.
Tant de chose à voir, à voir et à entendre, tant de temps à attendre à chercher dans le noir.
Et moi je vos la fin qui grouille et qui s'amène avec sa gueule moche et qui m'ouvre ses bras de grenouilles brancoches.
Je ne voudrais pas crever, non Monsieur, non Madame avant d'avoir tâter le goût qui me tourmente, le goût qu'est le plus fort.
Je ne voudrais pas crever avant d'avoir goûté la saveur de la mort.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire